26 décembre 2019

Amérique du Sud #42 De l'Est au Pantanal (Paraguay)



C'est le fleuve Iguazú qui, se jetant dans celui du Paraná forme la triple frontière avec L'Argentine, le Brésil et le Paraguay, avant dernier pays de ce voyage...


Le Paraguay...

      Ça me fait penser à heu... bah pas grand chose en fait sinon les 8ème de finale de France 98, le but en Or de Laurent Blanc et Chilavert, leur gardien de but qui tirait les penaltys...

C'est certainement le pays qui m'aura le plus donné de mal à tracer les grandes lignes de mon passage, car les gens sont d'ailleurs très évasifs concernant les sites touristiques du pays. Une Paraguayenne contacté par Alanderson, de Rio, disait : Si si, il faut venir, il est beau mon pays ! Mais quand on demandait des détails, les choses à visiter, on sent une gêne (je ne suis pas sûr qu'elle ait visité son pays en réalité).

Lucas, un paraguayen-brésilien, avec qui on s'est suivi à vélo, une demi-journée dans le Paraná, même chose :

- Ha oui c'est beau, tu vas aimer! Il y a heeeuuuu... ...Tout le côté historique de la guerre de la triple alliance et... beaucoup de gens vont à Ciudad del Este.
- Génial, y'a quoi à voir ?
- Bah, c'est pas cher, les gens y font du shopping.
- ... je gromnole 

Faut dire qu'ici, je ne pédalerai pas sur un désert de sel, ni sur des montagnes plus hautes que le mont Blanc, pour les jolies îles, c'est mort aussi, il n'y a pas de mers...

Bref, touristiquement parlant, c'est clairement pas "the place to be" et je n'ai que rarement entendu parlé du Paraguay chez leurs voisins Sud américains...

Deux fois plus petit que la France, avec seulement 7 millions d'habitants, le "gigantisme" du Brésil me paraît déjà bien loin lorsque je débarque sur les rives du pays...

Passage à la douane sans problème, l'agent regarde tous les tampons, me posant des questions du genre "Vanuatu ? C'est où ?", "y'a bientôt plus de place pour les tampons !", "Ça fait longtemps que tu voyages ?"... Ça ne reste que de la curiosité, certainement heureux d'avoir quelqu'un qui ne vient pas dans son pays simplement pour faire des emplettes...

Direction Ciudad del Este, pas grands intérêts donc sinon les prix de trucs dont je n'ai pas besoin, il y avait bien une chute d'eau un peu au sud mais je n'ai pas d'argent jusqu'à arriver en ville et ai la flemme de faire demi-tour.

Itaipu 

      C'est le barrage entrepris il y a 40 ans de ça qui se trouve sur le fleuve Paraná, entre le Brésil et le Paraguay. Ouvrage de tous les superlatifs. La visite commence par 20 minutes d'une vidéo de "C'est nous qui avons la plus grande nanananèreuuuh !" : il a fallu autant de béton pour le construire que X stades Maracana, autant d'acier que X Tours Effeil... etc...

C'est tout de même le second plus grand du monde, le plus productif du monde et contrairement à la majorité des barrages qui se trouve dans des vallées, ici, c'est tout plat et il a fallu creuser pour obtenir les 100 mètres de chutes nécessaires au fonctionnement des turbines.


Qui dit barrage, dit, terres submergées en amont, ici, c'est de loin le point noir du projet, le terrain plat fait un désastre écologique à une époque où on en avait rien à faire... Quelques animaux ont étaient sauvé de la noyade, placés dans des zoos histoire que le touriste paie un peu plus pour voir la faune locale...

Depuis, de nombreuses réserves ont étaient créées sur les berges, une réelle conscience de protection de la biodiversité est à relever (green washing en partie certainement aussi)... Bref, l'humanité fait de bien belles conneries pour satisfaire ses désirs de grandeur...


Vient le tour en bus, on descend une seule fois pour prendre des photos. Le reste c'est en mouvement, jusqu'à rentrer au Brésil ! Ha ha !

Puis retour à l'accueil, pas de visite de machine, d'explication un peu plus techniques, c'est un peu léger je trouve et je reste un peu sur ma faim quand j'enfourche mon vélo en partant vers le Nord. 


      C'est au milieu d'immenses champs de soja que je pédale, profitant d'un bon vent favorable et d'un peu de lecture vantant la bonne vieille agriculture intensive !


Le soir, j arrive à une station-service, je fais connaissance avec Ever, lui et ses compagnons, travaille juste à côté (mais vivent loin d'ici). Demain étant un jour férié, ils prévoient de se reposer. En attendant, c'est bières et barbecue auxquels ils m'invitent généreusement. 


      Les jours suivants se ressemblent, je fais quelques virées chez les pompiers, notamment à Nueva Esperanza, un soir de match pour le titre de champion du Paraguay, l'équipe d'Olympo arrache le nul et est sacré une journée avant la fin.

Petit tour à la police également. On m'a dit qu'ils étaient corrompus, j'ai lu des histoires de "taxes imaginaires" demandé aux étrangers. Ils m'abordent, me posent les questions communes de Mr Tout le monde, et finissent par m'inviter à manger avec eux... Coup de bol, cela me fait échapper à une grosse averse. Mais tu peux rester dormir si tu veux ! Qu'ils me lancent... une demi-journée devant moi, je décline et reprends la route.

Mes premiers appriories sont donc très bons, les gens ne sont certainement pas habitué à voir des voyageurs à vélo et font preuve d'une forte empathie. Ils ont aussi le reflex de se serrer la main, quand un simple "bonjour" nous paraîtrait suffisant. Mangeant sous un abri bus pour me protéger du soleil (ou de la pluie), je me retrouve à serrer la main de tout un banc de personnes.

Un autre jour, c'est à la caisse d'un supermarché que l'on me pose des questions sur le voyage avant de me dire : ha bah paye pas, ça te fera un souvenir ! Et puis ils m'offrent une chipa, spécialité paraguayenne à base de farine de maïs et de fromage. 

Bref, même si les jours suivants, ce concours de circonstances d'être invité constamment se tasse un peu, le voyage se passe super bien.

La route principale à l'est du Paraguay est en forme d'escalier, je suis le Nord 100 ou 200 kms, tourne vers l'Ouest, puis à nouveau vers le Nord. Le vent tourne mais est globalement favorable.


Laguna Blanca

      C'est un des premiers sites touristiques dont parlent les moteurs de recherches aux mots "Que voir au Paraguay", un petit lac à une trentaine de kilomètres de Santa Rosa del Aguaray.

J'avoue être bien déçu, c'est un lac classique avec quelques infrastructures où les familles se réunissent pour faire un pique-nique... et où il faut payer trois euros...


En plus de ça, le temps se gâte et j'essuie une nouvelle averse, par chance, à l'abri sous mon parasol...


Car oui, c'est la saison des pluies qui a commencé depuis peu. De ce fait, je me tape régulièrement de grosse averses, voire de très grosses... Alors qu'il fait au minimum de 35 degrés avec un très fort taux d'humidité, lors des averses, les températures baissent subitement, le petit vent rafraîchit un peu trop à mon goût et j'ai froid à en ressortir mon immortelle doudoune !

En espérant passer entre les gouttes...

      Et si le timing pour la pluie n'est pas optimal, la saison des mangues, elle, commence tout juste... Je m'en régale tout au long de la route...

Un peu plus vers le nord, les grandes parcelles de soja deviennent des près tout aussi immenses. 


Yby Yaú

      Nouvel arrêt chez les pompiers, le lendemain matin, je laisse les sacoches à la caserne et pédale vers des formations rocheuses à 15 kilomètres de là.



Conception 


      J'arrive assez tôt dans la petite ville de 100 000 habitants, j'ai pour projet de monter le fleuve Paraguay en bateau hamac. On me confirme ce que j'avais lu, le prochain départ est lundi (après demain). Je me réfugie une nouvelle fois chez les pompiers, très accueillant, ils m'invitent à m'installer dans un bureau vide.


À pied, je pars visiter la ville, le musée de la guerre, l'église, le marché et un merveilleux couché de soleil sur le fleuve Paraguay.



Le musée est en grande partie dédié à la guerre de la triple alliance évoqué tant de fois par les Paraguayens sur la route. L'époque où le pays était immense avant de se faire bouffer par l'alliance Argentine - Brésil - Uruguay il y a 150 ans décimant presque deux tiers de la population paraguayenne.


La ville, quant à elle, est à l'image du pays, bien tranquille, petite euphorie vers le marché mais pas plus...



Pour la suite du voyage, continuez tout droit...

Le dimanche, c'est barbecue chez les pompiers, je suis là aussi invité, je profite du four pour faire des gâteaux... On mange à notre faim et je goûte également la "sopa" paraguayenne qui comme son nom l'indique, n'est pas une soupe mais une sorte de souffler sans œuf à base de farine de maïs.

Le soir, on enchaîne avec un "baby shower" une sorte pendaison de crémaillère pour le bébé qui va venir au monde... On comble les quelques vides de nos estomacs dans une ambiance un brin coincé et clairement divisé avec d'un côté les filles, de l'autre les garçons, je trouve ça un peu étrange mais je n'ai jamais assisté à d'autres événements du genre, c'est peut-être les moeurs, ou pas...

Lors de ce petit arrêt, je refais également connaissance avec la douloureuse expérience auditive de la Cumbia (déjà écouté en Argentine, Bolivie et Pérou), sorte de musique polyphonique agrémentée de paroles niaises type "Mon amour, tu es la plus belle, la fleur de mes jours, les étoiles de mon ciel..." dans une société machiste comme celle de l'Amérique du Sud, ça me fait un brin tiquer... en plus du fait que c'est clairement insupportable... 

Rio Paraguay

      Le départ en bateau est prévu en fin d'après-midi, en attendant, c'est un déluge dont je suis bien content d'assister de sous un toit...

Le bateau ne touchera pas le fond de la rivière en tous cas...


17h, la pluie s'est calmée et le bateau fait enfin vrombir ses moteurs.

On est tous rangé comme des sardines sur des bancs qui font le tour de l'embarcation, il y a plein de vivres rangés dans des sacs et dans des cartons. Quelques hamacs sont suspendus mais je me rends vite compte que la majorité des gens vont dormir assis et les enfants, sur le sol !


Je trouve une petite place pour mon hamac, pendu encore plus haut que les piles de cageots remplis de légumes, je m'y sens comme un petit prince, tellement heureux de ne pas dormir assis !

La nuit, je rêve qu'on fait escale dans un petit village et qu'un petit-déjeuner à volonté est inclus dans le billet... je passe mon temps à manger beaucoup et rêve de manger encore plus ! Je crois que j'ai un problème avec la bouffe...



Le moyen de transport est original, je discute un peu avec les gens (ils sont assez réservés tout le même), je profite du paysage sans oublier de cuisiner car non, il n'y avait pas de buffet à volonté...


Beaucoup de nuages, un peu de pluie, de très belles éclaircies, parfois avec beaucoup de monde sur le bateau, parfois peu mais toujours sur mon promontoire de petit oiseau, le temps file tranquillement, à contre-courant...





Parti le lundi soir, c'est seulement le jeudi matin, avant l'aube que le bateau arrive à destination...

Pantanal

      Ça fait en réalité une bonne centaine de kilomètres que, via le fleuve Paraguay, nous sommes dans le Pantanal, c'est une zone humide, la plus grande du monde avec 150 000 km2, vingt fois plus grande que les Everglades en Floride. Une nouvelle zone de biodiversité exceptionnelle en danger : déforestation, acidification des sols, pesticides... Et comme sur l'Amazone, les gens qui balancent leurs déchets par-dessus bord nourrissant les poissons qu'ils auront dans l'assiette quelques jours plus tard et pourrissant l'eau de leurs descendants...

Fuerte Olympo 

       4 heures du matin ça s'agite, je suis tiré de mon hamac, nous sommes arrivé. Je charge le vélo et ne vois pas d'autres possibilités que commencer à pédaler, il fait encore nuit noire.

Vu l'état déplorable des WC sur le bateau, mon transit intestinal s'était visiblement mis sur OFF et c'est tant mieux ! Sortie de la ville, l'interrupteur change de position, et c'est accroupi que je me rends compte que c'est farci de moustiques !!

La saison des pluies à débutée depuis un mois, et c'est clairement la teuf pour eux. Une vingtaine sont posés sur mes sacoches arrières, tranquillement protégé du vent quand je pédale et quand je m'arrête, l'armée se met à l'attaque !

Le jour se lève, je me dis que ce n'est qu'une question de temps. Six heure, sept heure, rien à faire, ils sont toujours là. Je me badigeonne d'anti-moustique, m'arrête et contre attaque, opération extermination !

Deux ou trois échappent à mes baffes meurtrières, je continue de pédaler, trois kilomètres plus loin, le nuage s'est réformé...

Sinon les moustiques, l'endroit est clairement exceptionnel, je n'ai jamais rien vu de tel. Les bas-côtés sont recouverts d'eau, des oiseaux, des canards, je vois un caïman d'une soixantaine de centimètres aller se cacher et en entends quelques autres sans les apercevoir. 




65 kilomètres quasi non stop, quelques photos et vidéos prisent à la volée, je demande de l'eau également mais hors de question que je m'arrête de manger dans cet enfer et une question qui m'est souvent passée par la tête dans ce voyage et qui clairement ici ne trouve pas de réponse : Pourquoi vivre ici ??!!!

Toro Pampa 

      Une station-service, je me rue littéralement à l'intérieur demandant si je peux y manger ma gamelle. La climatisation à fond, les moustiques se tiennent (presque) à l'écart et je profite de ce temps de repos pour discuter l'état de la route. 

Car en venant ici, les échos me disaient que je ne pourrai certainement pas passer à vélo mais que des camions pourrait me faire avancer. On me confirme que la route, à une cinquantaine de kilomètres est inondée, qu'il est préférable de faire du stop. 

Tête brûlée que je suis, je continue, fais 12 kilomètres vent de dos, moustiques visiblement partis au lit (enfin pas tous, ne nous enflammons pas). Première grande flaque qui barre la route, je pousse le vélo au mieux pour éviter la boue : échec cuisant ! La boue est ultra collante, j'ai les pieds de HULK et mon vélo lui est devenu un fat bike !


Quinze minutes de nettoyage plus tard, et 45 minutes à pédaler face au vent, me voilà de retour à la station-service !

Ici, pas grand monde n'est optimiste sur le fait de trouver un stop à cette heure, ils me donnent un grand carton. Je me pose sur la route, j'attends et comme dans un dessin animé, une petite araignée commence à tisser sa toile... Ça me fait sourire, en espérant que ce soit pas un mauvais présage !


Vingt minutes plus tard, Bingo ! Une camionnette s'arrête, c'est parti pour près de 300 kilomètres 


Au compteur : 31 500 kms


Toutes les photos au lien suivant :



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