14 novembre 2019

Amérique du Sud #39 Bahia (Brésil)


      J'arrive en grande pompe dans l'état de Bahia, la journée devient frustrante car au-delà du record de kilomètres réalisé en un jour que j'espérais dépasser (anecdotique), je traîne sur une route qui devient bien trop vallonnée, peu intéressante et risque de ne pas arriver le jour annoncé chez Ariel, mon prochain hôte à Salvador.

Heureusement, Adrien, conducteur d'un petit camion s'arrête faire pipi une centaine de mètres devant moi...
- Tu veux que je t'avance ?
Mon visage s'illumine :
- Bien sûr !

En un éclair j'arrive à Praia do Forte, on est samedi, c'est blindé de touristes et ne trouve d'intérêt que pour le petit village qui a l'air plutôt tranquille comparé à la surpopulation de ses plages...

La route est pas mal empruntée, j'essuie les refus des stations services et tente ma chance à la sortie d'une église où j'aperçois quelques personnes.

Je rencontre Maggy, Carol et Froes.

Carol à étudié en Argentine et parle bien volontiers espagnol, ses parents ont eux, voyagé à moto sur une bonne partie de l'Amérique du Sud. Les sujets de discutions sont donc nombreux, je passe une très bonne soirée en leur compagnie et dors, en étoile de mer dans une grand lit bien confortable.

Le lendemain matin, je traîne encore un peu à parler avec Froes, puis repars sur la route direction la maison d'Ariel, 30 ans et sa maman Zélia.

Salvador 

      Ils me font remarquer que j'arrive chez eux à la Saint Michel, c'est effectivement le jour de ma "fête catho". En plus de ça, Ariel à reçu cette semaine deux sacoches, pour lui c'est un signe et me lance :

- Je te suis jusqu'à Chapada Diamantina !

Le temps qu'il récupère l'équipement nécessaire au voyage, je visite la belle ville de Salvador ET me repose, cela faisait 15 jours que j'enchaînais vélo et visite, je suis bien content de passer quelques heures à buller...




Ariel est chef, on passe quelques heures faire de bons petits plats, rien faire sinon cuisiner et manger en bonne quantité et bonne qualité, que demander de mieux ?

patience...



Salvador - Chapada


      C'est le grand départ, on décolle en fin de matinée. Sur la route jusqu'au parc de Chapada, Ariel a quelques contacts, on mange chez un ami à lui puis marchons, de nuit, dans le quartier de Bom Fim, avec une autre de ses connaissances. 


Les jours suivants, à coup d'une centaine de kilomètres par jours, on passe de la côte humide au "sertão" milieu bien plus aride avant d'arriver au parc de Chapada Diamantina, plus vert. Niveau campement, des maisons remplies de gens accueillants, une université et les immanquables stations service sont au programme.





Parc de Chapada Diamantina


      La cohabitation avec Ariel se passe bien, on partage beaucoup d'opinions similaires sur la vie, la religion et la société en général, tout en continuant de bien manger. 

Mucugezinho

Morro Paï Inácio (entre deux averses)

Son rythme est bien plus rapide, quand ses pneus ne crèvent pas, on s'adapte, on s'attend et arrivons à Caete Açu chez Minha, une amie à lui.


Jour de "repos", en tout cas pour le vélo, on part en rando vers la "cascade de fumée" Après 2 heures de marche, je comprends d'où vient le nom...




Il y a beaucoup de vent, nous rampons chacun notre tours au "belvédère"


Plus tard, on suit Tamara, une Brésilienne de notre âge un peu en amont de la rivière, l'endroit est magnifique et pour le coup, sans aucun touriste !



Tout frais d'une baignade dans l'eau ferreusement gelée, on retourne chez Minha et partons dès le lendemain vers le sud via une piste qui nous occupera deux jours...




 

Les coulisses des photos...



Bain dans l'étan avec une superbe vue... La vérité c'est que de petits poissons nous "croquaient", c'était pas super agréable, on a pas traîné...





Igatu

      Par chance, c'est par une descente qu'on arrive au petit village. Les mains crispées, serrant autant que je peux les freins, je "dévalle" la pente bien trop raide. La route est affreusement belle, de bon gros pavés taillés probablement avec les pieds il y a un bon siècle, c'est authentique et dans son jus !



Nouveau bain !


Pour m'éviter de remonter la pente et de pester contre ses concepteurs, je décide de faire un détour en continuant la descente 10 kilomètres,  je remonterai via une route asphaltée.

Les freins chauffent une nouvelle fois, je suis à 5 kms/h. Une camionnette s'arrête et me propose de m'amener (je suis parti un peu plus tôt qu'Ariel qui terminait de chargeait son téléphone au village). Du stop pour une descente, une première... Si j'étais à 5, la voiture, certes, pas toute jeune, ne dépasse pas les 10 kms/h... v'là l'état des routes...


En bas, dernière accolade avec mon compagnon de route éphémère, il repart vers le nord, moi, vers l'est. C'était bien sympa cette petite parenthèse "sociale", je suis content d'avoir pu initier une personne au voyage à vélo et qui sait, on sera peut-être amené à se recroiser en Europe ou ailleurs...

Poço encantado

      Le lieu se mérite un peu quand même avec un détour d'une dizaine de kilomètres sur une piste bien naze.
J'arrive à l'entrée, ai le temps de manger un bout et je me greffe sur un groupe de Brésiliens.
Casque sur la tête, lumière sur le front, nous descendons dans une grotte et découvrons le trou d'eau...


C'est impressionnant, le point d'eau se rempli lors des crues de la rivière voisine, environ deux fois par an.
La couleur est due à la forte teneur en magnésium et de calcaire de l'eau.
En trichant un peu avec les réglages de l'appareil, j'arrive à faire ressortir les couleurs de l'intérieur de la grotte...


Ressorti de notre trou, je reprends la route de terre bien compliqué, roulant jusqu'à la tombée de la nuit et enfin retrouver la douceur de l'asphalte.

Une fissure et CRAC

      La route qui me fait rejoindre la côte présente pas mal de kilomètres de piste plus ou moins praticables. Les descentes d'Igatu aillant probablement fragilisé ma jante, celle-ci se fissure au beau milieu de nulle part. Je croise deux gars qui remplissent des bidons d'eau à une source "Vai ! Vai !" Traduisible par : Ça va, ça va (tu peux continuer tranquille)

Auquel je réponds un peu agacé par cet optimisme permanent des gens qui te disent juste ce que tu souhaites entendre : Ça va, ça va, jusqu'au moment où ça n'ira plus !


Trois kilomètres plus loin, la fissure s'agrandis, la chambre à air explose...

Je pousse le vélo et arrive à un petit bar qui n'ouvre que dans quelques semaines. Je me pose et réfléchie à une solution.

Aller jusqu'à la côte est compliqué, il y a beaucoup de bifurcations, je vais galérer en stop, encore pire avec le vélo ! De plus, ma destination (Itacaré) n'est pas une grosse ville et ne trouverai peut-être même pas de jante.

Je demande finalement à poser ma tente au bar, je partirai demain, seulement avec la roue, à Ubaitaba, une petite ville, 20 kilomètres "en arrière", le genre d'endroit où j'étais certain de ne jamais revenir...

Arrivé assez tôt dans la ville, le résultat est sans appel, aucunes jante de ce diamètre et pour freins à patin ne peut se trouver... Sur le retour, je retourne dépité à l'atelier de Neil. Il m'avait indiqué LE grand magasin de la ville où je trouverai mon bonheur. Surpris de me voir les mains vides, il me dit de patienter quelques secondes et s'absente au fond de son atelier. Il ressort avec une roue, déjà montée dont il casse les rayons et enlève le moyeu, il me tend la jante, d'occasion, tachée d'un peu de peinture : Elle est à toi ! Je n'ai pas le temps de te la monter avec tes rayons mais va au pied du pont, un ami a un atelier, il te le fera...

Coup de chance, le bon diamètre, la bonne largeur, le bon nombre de rayons pour le même type de freins... Il ne devait pas y en avoir beaucoup d'exemplaires dans la ville, j'en ai une !!

J'aide Carlos, en tout cas pour démonter chaque rayon, il remonte la roue et à 12h, revenus en stop, je suis déjà 20 kms plus loin à faire mes au revoirs à la famille du bar.

À noter que cette jante "Shining", achetée à 8€ à La Paz aura fait plus de 12 000 kms alors que la DT SWISS (marque de "référence" à 40€), au bout de 6 000 kms, avait déjà rendu l'âme... 


Alentours d'Itacaré 

      Je décide de ne pas aller au village. Ultra réputé, je sens venir la déferlante de touristes se marcher dessus pour s'échouer comme de vieilles baleines sur leur serviette de plage. Je préfère "m'isoler" un plus vers le sud, des plages y sont également très réputées et plus difficile d'accès si on n'est pas véhiculé. 

Je descends jusqu'à la plage de Jeribucaçu où il est possible de camper d'après certains locaux. Je me tape un dénivelé de 100 m sur moins d'un kilomètre en passant par des chemins qui me font craindre le pire pour demain à les remonter. J'arrive sur la plage exténué, il est déjà tard : c'est pas sur cette plage qu'il est autorisé de camper, c'est sûr la suivante, à 20 minutes ! Voyant mon air agacé : mais le chemin est nickel, regarde !

Effectivement, un chemin tout plat, tout beau sur... 100 mètres... Après c'est jouer au chamois sur les rochers et un vélo de 50 kilos auquel je préfère parfois enlever les sacoches et faire des aller et retour plutôt que me crever à la tâche et finir dans l'eau...

L'endroit en vaut franchement la peine, dommage d'arriver un peu tard, il faut mettre la tente, prendre une douche et faire à manger, pas le temps de se baigner, je reste quand même à profiter du paysage jusqu'à pouvoir admirer le beau ciel étoilé, seul au monde...


Certainement un des plus beaux endroits où j'ai posé ma tente ! Bon après, j'avoue ne pas prendre beaucoup de risques pour mes bivouacs et préfère dans 99% des cas un lieu caché, à l'abri du vent, d'une éventuelle pluie...

C'était le 1% et j'ai pas super bien dormi en réalité...



Le lendemain donc, je refais le funambule pensant à la terrible monté qui m'attend...

Je galère un peu puis, la pente s'arrête soudainement, je reconnais à peine le chemin voire plus du tout. Au loin, j'entends la route, c'est bizarre car j'ai normalement plus de 5 kms à faire avant d'y arriver.

Je me rends compte que j'ai malgré moi pris un raccourci, via une pente beaucoup moins longue sans avoir la moindre idée de où j'ai pris à gauche au lieu d'à droite !

C'est sans trop comprendre mais le sourire aux lèvres que je rentre, via ce nouveau chemin, par l'arrière d'une propriété privée, cadenassée par devant et surtout avec 3 chiens qui montent la garde, un peu fâchés. 

J'essaye d'appeler les propriétaires, tout est fermé, les deux plus petits chiens sont vraiment énervés, je commence à prendre peur et reculer. Très mauvaise idée, les deux clébards prennent de l'assurance, ils avancent, je recule (comment voulez vo... nan, pas avec des chiens). Je comprends le jeu et crie en gesticulant, les chiens prennent peur, je m'éloigne vers le portail sous les yeux du plus gros toutou, qui lui, en a un peu rien à faire de tout ça...

Je balance les sacoches, le vélo puis mon popotin et hop

Sauvé !

Je poursuis mon chemin jusqu'à Hawaizinha, un peu plus au sud.

Il est à peine 8h, je mets l'antivol au vélo, demande aux vendeurs de glace et autres cocos, tout juste arrivés, de garder un œil dessus et m'en vais me promener.

Je longe plusieurs plages, totalement désertes, c'est suffisamment beau pour que je me mette à l'eau (au risque de devoir finir ma journée avec la peau salée, c'est souvent ce qui me dissuade de me baigner...)



Sur le retour, les employés de petites paillotes, en train d'ouvrir m'indiquent une douche d'eau douce... le rêve !

Plus tard sur la route, avant qu'elle redevienne plate et un peu plus morose, je profite du belvédère de Serra Grande.


Ileüs 

       Milieu d'aprem, je fais un petit arrêt sur la route pour jeter un œil au centre-ville. C'est sympa, il y a de beaux points de vue, en hauteur, ce qui me fait cravacher un peu...


En fin d'aprem, je pars à la recherche d'une station-service lorsqu'un gros 4x4 s'arrête à ma hauteur. C'est Charles, un futur voyageur à vélo qui après avoir échangé deux trois minutes ensemble me propose de dormir chez lui.

Nous chargeons le vélo dans son pick-up, et repartons vers le nord.

Dans sa maison, il a un "vélo couché" électrique (c'est de ces vélos où nous sommes allongé sur le dos). Il a tout le matériel, du rétro au poncho en passant par le réchaud. Il prévoit lui aussi un premier voyage vers Chapada Diamantina début d'année prochaine.

Parapente

      S'il refuse mon invitation à aller jusqu'à Rio à vélo, il me propose rapidement de le suivre à Santa Teresinha pour un weekend parapente, qu'il pratique depuis 20 ans. Il aspire même à me faire voler avec un ami à lui qui a un "double".

Vendredi matin, je profite d'un peu de temps libre pour réviser un peu le vélo, laver mes fringues et nous partons quelques heures plus tard, cheveux au vent dans le 4x4 (lui aussi est chauve...)

Santa Teresinha 

      300 kilomètres plus au nord, je suis déjà passé ici, il y a une dizaine de jours, avec Ariel, nous partions vers l'ouest. Je fais connaissance avec les amis de Charles et nous partons en ville boire quelques bières avant d'assister à la remise des prix du dernier tournoi de parapente.

Le lendemain, sur la rampe, le vent n'est pas au rendez-vous, nous attendons sagement d'interminables heures à l'ombre d'un petit abri et des deltaplanes...


C'est seulement en milieu d'après-midi que le vent se lève, quelques personnes s'envolent...


C'est là que je trouve le moyen de laisser les clés à l'intérieur de la voiture de Charles qui se ferme automatiquement... Grâce à quelques personnes et quelques bouts de ficelles, nous arrivons à ouvrir la portière de l'intérieur, un peu plus tard, nous retournons en ville puis à l'hôtel pour une soirée plus tranquille que la veille.



Le jour suivant, le vent est de la partie, pas de décollage pour ma part, je pense que Charles s'est un peu enflammé en disant que son pote me ferait voler... J'admire les ailes, je trouve ça poétique la relation avec la nature, il n'y a pas un bruit. Certains m'expliquaient la connaissance qu'il fallait apprendre pour savoir reconnaître les courants ascendants, observant les nuages, les oiseaux, le relief...


Seul et immergé en pleine nature, des souvenirs d'Altiplano me reviennent à l'esprit...

Le lendemain matin, de retour à Ileüs, Charles m'amène jusqu'à la route principale. Accolades chaleureuses et je reprends mon petit train train vers le sud du pays...

Les journées qui suivent sont compliquées, principalement à cause du bas-côté souvent inexistant, beaucoup de trafic dont des camions qui ne respectent rien et la pluie qui, de jour comme de nuit, me rends bien trop souvent visite.


Un matin, je pense sérieusement à faire du stop car la veille a été très pénible psychologiquement. Regarder constamment le rétroviseur, sauter hors de la route si deux camions vont se croiser (ils ne connaissent pas le frein...). Je petit-déjeune à un arrêt de bus et regarde la route d'où je viens. Je vois un panneau [fin de la section de l'entreprise "jenesaisquoi"], l'application GPS indique qu'un peu plus loin, il y a un péage... Après le virage, c'est une belle autoroute bien large qui m'attend pour m'accompagner jusqu'au prochain état de ce gigantesque pays qu'est le Brésil...


Au compteur : 27 600 kms

Toutes les photos au lien suivant :

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