25 mai 2019

Amérique du Sud #32 Venezuela intérieur


      C'est à pas moins de 5 que l'on part de Guacara, au fil des kilomètres, je dis aurevoir à Aires et Luis, Saoul et Edinson me quitte, ce dernier m'a quand même accompagné plus de 50 kilomètres !!

Los llanos 

      C'est ici que je vais user mes pneus pour traverser une bonne partie du pays. "Les plateaux" sont en fait un plateau vallonné où ont été "posées" de longues et ennuyeuses lignes droites...


Si la route n'est pas des plus passionnantes, c'est sur ces quelques centaines de kilomètres que je fais le plus de rencontre.

Marbelys, Carlos, Solangel, Sandra, Carmen, Raul, je rencontre des gens de tous les milieux, tous très attachant et partage avec eux de très beaux moments...

Au petit matin, Carmen me dit qu'elle va laver mes habits, j'en profite pour aller en ville régler deux trois trucs au vélo, à mon retour, elle me dit "ha zut, j'ai oublié de mettre tes vêtements à laver... mais... tu ne pars pas aujourd'hui hein ??". Je me suis senti très vite adopté et encore plus rapidement par les petites ! Plante une tente devant un enfant et tu deviens direct son meilleur ami !!

Cours de cuisine avec Solangel et ses empañadas !

Direction le parc de la Llovizna le ventre bien rempli après avoir été invité par Raul au repas de son entreprise dont il est le patron...


La bouffe !!

      Pareil que pour la politique, je fais un petit topo :

Le salaire minimum est d'environ 5 dollars soit le prix de 36 œufs ou 1 kilo de viande.

Les gens ont faim, discutent constamment d'où est-ce qu'ils ont acheté telle ou telle chose à pas trop cher, je ne parle pas de petits plaisir de riche : chocolat, vêtements, bières, ils cherchent les fondamentaux (riz, pâtes, lentilles et farine de maïs). Une chose qui me fait sourire c'est les vénézuéliens discutant énormément des bons petits plats qu'ils se cuisinaient "à l'époque". Cela me rappelle l'Australie et notre troupe de Français bavant en s'imaginant devant son gratin dauphinois, son aligot ou ses galettes saucisse...

Par conséquent, beaucoup de gens ne travaillent même pas pour ce salaire de misère (près de 50% de chômage), et c'est en réalité, toute une économie parallèle qui se créée. Les gens vont vendre de la nourriture dans la rue, des objets acheté en grosse quantité et se faire une marge...

Les jeunes eux, se tournent vers le net, achats/vente via le "boncoin" Sud américain, services dans l'informatique...

Vient enfin une tranche de la population importante vivant d'argent envoyé par les proches travaillant à l'étranger : États-Unis, Colombie, Brésil, Argentine, Chili... 

Certes, c'est la galère mais les gens d'entraide beaucoup, gardent le sourire en espérant des jours meilleurs et ça m'a un peu rassuré lorsque l'on m'a dit "on survit plutôt bien".

En réalité, j'ai vu beaucoup plus de misère aux villes frontalières (côté étranger), des femmes avec enfants débarquant sans rien de plus qu'un sac à dos se réveillant sur des cartons, des gens cherchant en vain du travail depuis des mois croyant que se serait l'eldorado mais devant brutalement faire face à une concurrence démesurée... Si la politique socialiste ne donne pas envie de voter à gauche, la misère aux frontières ne donne pas envie de voter à droite... 

Bref, face à cette situation, je change mes habitudes de voyage. Exit les détours aux boulangeries et mes demandes de pains vieux, de toute façon, les quelques boulangeries ouvertes vendent exclusivement du riz, des lentilles et de la farine de maïs...

Pareil pour les fruits et légumes "moches", je ne me sens plus réellement légitime à les demander... Je fais par contre une cure de mangues, elles sont en abondance dans les arbres et j'en mange 2 à 3 kilos par jour...

Chez les gens où je demande l'hospitalité, je dis d'entrée que je cherche un endroit pour mettre la tente et que j'ai ma propre nourriture. Malgré ça, énormément de personne me donne un peu, voire beaucoup (paquets de riz, de pâtes, de sucre...) me rendant souvent mal à l'aise...

L'aide de la garde nationale 


      Presque aussi compliqué que d'accepter, un paquet de riz d'une personne n'aillant déjà pas grand chose à manger, je mettrai : accepter de la bouffe de la garde nationale. Cela m'arrive deux fois, ils me voient passer, me saluent, me posent des questions et me voyant tout maigre, voulant aussi faire croire à l'étranger que tout va bien dans le pays des corrompus, me donne à balle de bouffe ! 2 kg de riz / 500 g de fromage / 4 poivrons / 2L de coca la première fois et 

3 kg de farine de maïs (je la cuisine comme de la semoule), 1kg de sucre, 1kg de pâtes, poivrons, aubergines la seconde.

Si sur le papier c'est énorme car ça me fait moins me préoccuper sur le fait d'avoir suffisamment de nourriture pour la suite, ces provisions sont malheureusement parfois dérobées aux passants (comme je l'expliquais dans l'article précédent). Cela donne un peu plus d'amertume aux poivrons et, gardant quand même une bonne partie pour moi, je redistribue le reste sur la route essayant certainement de me donner bonne conscience...

Les Pemons 

      C'est le nom des autochtones occupant le Sud du Venezuela. Dès la ville "kms 88" l'ambiance change, les gens n'ont plus peur de montrer leurs billets et pour cause, une sorte de mafia ferai régner l'ordre sur le territoire Pemon. Je schématise : si tu voles qui que ce soit, on te coupe les mains... c'est d'ailleurs vérifiable sur le site du gouvernement "sécurité aux voyageurs"

Je dors quelques fois dans les communautés, ils sont plutôt réservés, m'observent tous quand je monte la tente, quand je cuisine et leur espagnol est plutôt approximatif rendant la communication compliquée. Malheureusement, l'éducation n'est souvent pas accessible pour les enfants faute de transports publics et malgré des routes asphaltées correctes (vraiment socialiste ce gouvernement ?)

La Gran Sabana 

      C'est un moment que j'attends depuis longtemps, un lieu qui doit certainement faire parti de mon top 10 des lieux à voir en Amérique du Sud, une sorte de lieu coupé du monde comme je les aime à parcourir...

C'est un grand plateau, parsemé de tepuy, sorte de table géologique ? d'où ruissellent des cascades dû au mauvais temps qu'il y règne au sommet et aux nappes phréatiques qui y retiennent l'eau.

Le plateau se trouve à environ 1000 mètres d'altitude et c'est armé de fainéantise que j'arrive au bout des 35 kms de monté... à bord d'un camion :)

C'est là que je rencontre Lenoir, vénézuélien (super calé en foot) qui achète de la mayonnaise en gros pour la revendre à la ville frontalière de Santa Elena. On tombe en rade d'essence, par chance à proximité de la garde nationale où on demande aux voitures qui passent de nous dépanner (c'est ici que les militaires me donnent de la nourriture pour la seconde fois).

Lenoir insiste pour me déposer chez une connaissance à lui, quelques kilomètres après l'entrée du parc.

Cela fait plusieurs jours que l'électricité se fait rare, mes batteries se déchargent peu à peu jusqu'à ne plus pouvoir prendre de photos... Je suis ultra frustré car les paysages sont super et il n'y a vraiment pas grand monde sur la route renforçant le sentiment d'être coupé du monde...

Quelques cascades viennent interrompre mon avancé... Photos volées donc :D


Roraïma

      J'ai 80 dollars en poche, une dizaine en monnaie locale (que je veux garder pour sortir jusqu'au Brésil). Je me rends compte que ce sera juste financièrement pour trouver un guide. Je monte donc directement jusqu'au petit village de Paratepui, communauté qui se situe à 26 kms de la route principale et où les prix devraient être plus raisonnables... C'est plutôt défoncé, ça grimpe pas mal et les averses rendent le chemin boueux... J'arrive beaucoup plus tard que ce que je pensais et totalement crevé... Il m'aura fallu 5 heures pour faire les 26 kms...

Sur la route, j'ai parlé à deux personnes, se prétendant guide et dont "mon prix" n'a pas choqué. J'ai appris plus tard que 80 dollars correspondait au prix que paye une agence aux porteurs de sac pour 6 jours. En plus de ça, j'ai la nourriture de la garde nationale qui suffit pour moi et le guide. Tout ça m'offrant même le luxe de "louer" un appareil-photo numérique !

Le treck 

Jour 1

      C'est avec Emilio que je pars le surlendemain, je l'ai rencontré sur la place principale lors de mon arrivée à la communauté. 

C'est le début de la saison des pluies, ça fait deux jours que le temps est mauvais et j'avoue ne pas me chausser avec beaucoup d'optimisme quant à la vue du ciel...

Même si j'emporte la quasi-totalité de la nourriture, Emilio à également amené  quelques spécialités !

Des termites gourmandes croquantes ! Ça n'a pas énormément de goût, mais c'est plutôt bon...

On continue dans le vent, sous le crachin et nous appercevons le premier tepuy.


À oui, car il me fallait également trouver un sac à dos ! Made in la communauté : le sac en osier ! C'est confortable si on met les objets mous contre le dos mais les lanières de cuir sont un peu fines et manquent cruellement de rembourrage !

On arrive à la rivière Tek, c'est de l'autre côté nous camperons mais les pluies ont fait monter l'eau beaucoup trop haut. Nous attendons une bonne heure, Emilio traverse à petits pas, de mon côté, je traverse à la nage un peu plus bas...

C'est en attendant la décrue que le soleil se joint à nous rendant le paysage magnifique...



Quel homme cet Emilio !

Le campement est préparé pour les marcheurs : d'un coté, une petite cabane pour cuisiner, d'un autre, un toit pour protéger les tentes d'éventuelles averses...

Je m'isole un peu pour le coucher de soleil et nous nous couchons rapidement...


Jour 2

      Le soleil est là pour nous accompagner, l'endroit est magnifique. Nous marchons vers le mont Roraima dans un silence de cathédrale, seul le grincement de l'osier lors de chacun de mes pas rompt ce doux silence...


Vient la partie "tropicale" qui serait comme la "base" du tepuy, une partie inclinée à la végétation très dense.


L'accès au sommet se fait par une sorte de rampe naturelle, particulièrement abrupte avec en prime, une cascade à traverser...




Au sommet, un monde à part, c'est très humide, la faune et la flore très limitée notamment par la roche omniprésente qui rend l'endroit très inhospitalier...




Jour 3



      Ça ne pouvait pas durer, nous nous réveillons dans les nuages entre crachin et averses. La visite du sommet se fait rapidement, mais avec assez de temps pour s'imprégner de cette atmosphère chaotique... J'ai eu le temps de bien imprégner de flotte surtout ! XD


Les plantes carnivores "mangeuses d'hommes" d'après la culture Pemon...

On redescend plus vite que prévu donc laissant la baignade dans les "jacuzzis" pour la prochaine fois...


La descente se fait en regardant mes pieds pour limiter les risques de glisser, Emilio nous trouve quelques fruits sur les arbustes et arrivons à la tombée de la nuit au campement de la rivière. Derrière nous, les tepuy sont toujours dans les nuages, pas de regrets de ne pas avoir attendu le soleil au sommet...

Jour 4

      Retour à la maison vers midi, le temps est toujours mitigé, je réordonne les sacoches, lave mes habits et prends une vraie douche bien méritée.

Le manouche de la place du village...

Les derniers kilomètres (à vélo cette fois) jusqu'au Brésil se font bien, le temps est encore mossade et je suis toujours dans la frustration de ne pas faire de photos... L'endroit est paisible, au loin, les tepuy, plus proche de moi, des palmiers éparpillés sur les plaines...

Photo Google très proche de ce que j'ai vu "nuageusement" parlant...

La frontière

      Encore un choc, peut-être 90% de Vénézuéliens, la quasi-totalité sans passeport à faire une queue interminable. Je mets déjà 2 heures pour avoir mon tampon, visiblement, ce seraient 8 pour les personnes sans passeport...

Dans la queue "passeport" je suis à côté de 2 vénézuéliens quittant le pays, un allant à Manaus, l'autre va jusqu'à Buenos Aires, ils me disent qu'il n'y a rien de plus frustrant que faire marcher l'économie du pays voisin... heu, je n'avais pas ce sentiment en Australie et ne devrais pas le ressentir en Suisse non plus XD

Blague à part, ça fait de la peine de voir tout ces gens à la recherche d'un futur moins glauque que celui qui leur est promis dans leur pays d'autant plus que la situation n'est pas la conséquence d'une catastrophe naturelle, tremblement de terre ou autres tsunamis, mais bien la responsabilité de politiques corrompus et totalement incompétents...

Au compteur 21 600 kms :


Toutes les photos de l'article au lien suivant :
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